On parle damganais au Sénégal!
Dans cet article nous allons vous présenter les recherches d’un damgano-sénégalais: Alpha Oumar NDOYE, habitant de Damgan et originaire de la région de Dakar qui a été frappé par la similitude entre les langues wolof et bretonne. Après vous avoir présenter ses recherches, nous avons le plaisir de l’interviewer.
Similitudes entre les langues bretonne et wolof : On parle damganais au Sénégal! (et inversement…)
Par exemple, diwann et ker se prononcent et signifient la même chose dans les deux langues, c’est-à-dire institut – association et maison.
Alpha a traduit des mots breton1, 2 en wolof (langue des lébous et de la majorité des sénégalais) à l’aide d’un tableau, voir ci-dessous. Il a été frappé par le rapprochement des prononciations phonétiques de mots des même sens (ou sens voisin) des deux langues.
Tableau de comparaison linguistique :
Breton | Wolof |
Goude : après-midi | Goudi : nuit |
Gwelyou : fête | guewel: griot, fête |
Gwir rewiirr lou wir : vrai | Lou weureu weureu weuur ou lou weir ra weir ra weir : vrai de vrai, vérifié et prouvé |
Dor rew : casser le cul | Dor kou rew : taper un mal élevé |
Ar baol, (la Baule), monticule de terre | Ar baol ou bawal, nom d’une région historique du Sénégal: protéger cette monticule de terre |
Glaw: pluie | Taw : pluie |
Waat : âge | Aat (wolof) : âge |
Kentan : choisir | Tann ken ou tanna kena: choisir un(e) |

Parmi les mots moins semblables phonétiquement, il y note une constance ou persistance de leur racine identique (consonnes et voyelles dans la prononciation) : Glaw/ Taw et Waat / Aat.
D’une langue à l’autre, il remarque que certains mots de même sens s’inversent mais conservent leur racine commune: Kentan/ Tanken.
En écoutant les radios locales bretonnes et dakaroises, les airs de chansons traditionnelles léboues et bretonnes se ressemblent.
Les airs de chants des Soeurs GOADEC3 rappellent certains chants lébous hélas presque disparus. En l’écoutant de loin, ces airs lébous donnent l’impression d’entendre l’anglais texan avec une prononciation rapide.
Histoires de Yoff…

A la sortie de Muzillac, il existe un lieu-dit qui s’appelle Yoff (voir figures 1et 2) 7,8.
Or, le Yoff (voir figures 3, 5 et 6)10,11 de la Région de Dakar (abrite le plus grand aéroport du Sénégal.
Selon ses recherches documentaires, Alpha observe que ces deux Yoff (du Morbihan4 et de Dakar5) furent fondés à la même période à peu près au XVè siècle et ils présentèrent les mêmes types de population composés essentiellement de pêcheurs.

Il ajoute que, dans les religions traditionnelles avant le christianisme ou l’islam, un esprit s’appelant Castel était adoré par des celtes ou plus particulièrement des bretons selon certains traditionnalistes bretons. A l’ile de Gorée4 (« l’ile aux esclaves ») de la région de Dakar, son génie protecteur s’appelle aussi Castel ou Coumba Castel. Il est toujours vénéré par les lébous.
D’après lui, pendant la colonisation, les bretons constituèrent une forte communauté à Dakar (voir figure 4)9. Ils sont moins nombreux aujourd’hui, le siège de leur association se trouve toujours à côté de celui des corses.

Figure 4 : la corniche de Dakar abritant le siège de l’association bretonne.
Cependant aucun élément durant leur expatriation ne fait état d’une quelconque influence linguistique bretonne sur le wolof. Cette dernière multiséculaire utilisait la plupart des mots évoqués bien avant l’arrivée des « Navigateurs ».
Un sage yoffois de Dakar, Oumar N’galla GUEYE6 affirme que les anciens relataient que les lébous entretinrent des rapports conflictuels permanents avec les perses dans les siècles antérieurs à Jésus Christ. Alors que dans les archives, la relation entre bretons et perses fut relativement pacifique.

Alpha Oumar NDOYE conclut : « Je crois fort que si on arrive à trouver les liens qui unissent les lébous (ou les sénégalais en général) et les bretons, alors on pourrait avoir plus d’éclaircissement sur nos origines respectives. Je rêve un jour que deux chanteurs sénégalais et breton, notamment Youssou NDOUR et Allan STIVELL, chantent ensemble avec des mots communs aux deux langues.
Cela ne relève plus du hasard !!!!!».

NOTRE INTERVIEW :

Alpha Oumar NDOYE, damganais et originaire de la région de Dakar a été frappé par la similitude entre les langues wolof et bretonne. Voici son interview portant sur le résultat de ses recherches:
Bonjour Alpha, pouvez-vous vous présenter ?
Je m’appelle Alpha Oumar NDOYE, originaire de Dakar (Sénégal) et habitant à Damgan .Je suis de formation biochimiste et chargé de mission en Développement durable et prospective. Mes ancêtres sont les fondateurs des communes de Dakar dont Yoff qui fait l’objet de mes recherches.
Vous évoquez souvent des rapprochements culturels entre le breton et le lébou, d’où est né cet intérêt de comparaison?
En Bretagne historique, il est courant de voir écrire ou d’entendre des mots tels que ker, diwan qui signifient respectivement maison et institut-association-école. En wolof aussi on emploie ces mêmes mots pour les mêmes sens. Mais j’ai été étonné quand j’ai croisé pour la première fois sur la route de Muzillac un panneau indiquant le Lieu-dit « Yoff». Une commune de Dakar porte ce même nom et abrite le plus grand aéroport du Sénégal. Je me suis donc renseigné un peu plus tard sur ce lieu d’Ambon et j’ai appris que ce village habité par des pêcheurs avait été fondé au XIVe. Cette même période correspondait aussi à la fondation du village « Yoff » de Dakar par les lébous qui furent majoritairement des pêcheurs.
Je me suis dit que ces constats ne relèvent plus du hasard !!!
Ainsi, je me suis intéressé à quelques villes bretonnes, comme la Baule dont son nom bretonnant est « ar Baol ». Baol est aussi une région historique du centre du Sénégal. Ces deux « Baol » évoquent un monticule de terre. Et ar baol dans le wolof ancien signifie protéger la dune.
C’est autant d’indices qui confortent mon constat au sujet du rapprochement culturel et même territorial des deux communautés.
Les lébous, qui sont-ils et quelles sont leurs origines ?
Le lébou est une minorité ethnique sénégalaise fondatrice de l’actuelle région de Dakar, capitale du Sénégal, de Saint-Louis (appelé Ndar en wolof) au nord et des villages traditionnels de la côte atlantique ouest des départements de Mbour et de Thiès. Il parle le wolof, langue majoritaire au Sénégal et une bonne partie de la Gambie et de la Mauritanie. Cette ethnie est originaire de l’Egypte pharaonique, selon l’égyptologue sénégalais Cheikh Anta DIOP, et même plus loin de l’Inde selon le sage historien yoffois Galla GUEYE. Considérés comme sémites et ayant une descendance salomonique selon des anciens, les lébous conservent néanmoins des pratiques et coutumes héritées des pharaons d’Egypte (nommés « Faré » en wolof), dans leur organisation politique, jusqu’à aujourd’hui. Ils quittèrent l’Egypte au VIie-VIe avant Jésus-Christ et une partie arriva au Sénégal vers XIe-XIIe d’après le chercheur Cheikh Anta DIOP.
Très influents vis à vis de l’Etat actuel, depuis la colonisation, les lébous gèrent toujours en toute autonomie les affaires politiques et sociales de leurs territoires traditionnels de Dakar et élisent leur chef appelé Sérigne Ndakarou.
La majorité des lébous étaient citoyens français depuis Louis XIII et Louis XIV (cf.débat parlementaire français sur l’indépendance de la Fédération du Mali), avant les savoyards et les niçois, et leurs territoires (Dakar, Gorée, Saint-Louis, Rufisque) avaient les statuts de département français avant l’indépendance des colonies africaines. Leurs élus siégèrent à l’Assemblée Nationale française. Leurs femmes étaient les premières françaises à voter dans les élections locales (municipales, législatives, …).
Ils sont connus pour être des têtes dures, attachés à leur indépendance et même de fin politiciens qui influèrent souvent la décision du Gouverneur colonial français installé à Dakar, capitale à l’époque de l’Afrique Occidentale Française. Ils sont réputés en matière de pêche et de connaissances en mer, raisons pour lesquelles ils sont souvent sollicités au port de pêche de Lorient.
Le philosophe métis franco-sénégalais Gaston BERGE, l’artiste Maurice BEJART, le député Blaise DIAGNE (des années 30 et 40) et Rama YADE sont originaires de ces anciens départements français d’Afrique.
Dans vos recherches, avez-vous trouvez d’autres similitudes culturelles ?
Oui mieux que ça, j’ai trouvé des similitudes linguistiques de même sens ou voisin.
J’apprends occasionnellement le bretons (et le vannetais aussi). A l’aide de livres de breton, je me suis amusé à traduire des phrases et des mots en wolof par exemple :
-Gwir rewiirr lou wir en breton et Lou weureu weureu weuur ou lou weir ra weir ra weir en wolof signifient vrai des vrais.
-Goude en breton et goudi en wolof décrivent respectivement après-midi et nuit
-dor rew en breton et dor kou rew en wolof signifient respectivement casser le cul (excusez-moi de l’expression) et frapper un mal élevé
-etc….
J’ai été alors surpris par la similitude des prononciations relativement de même sens.
Puis, j’ai noté qu’en passant d’une langue à une autre, les prononciations s’inversent mais décrivent la même chose comme kentan en breton qui veut dire « un choix » et tanken en wolof, « choix un ».
Ensuite, j’ai noté la persistance de racines phonétiques identiques de mots bretons et wolofs relativement différents mais décrivant la même chose, notamment :
le « aw » de Taw en wolof et glaw en breton signifiant tous les deux la pluie
le « euw » de vro en breton et réuw en wolof traduisant un pays
Le « att » de att en wolof et watt en breton qui veut dire âge
Etc….
Je suis agréablement surpris par la ressemblance linguistique et territoriale des deux communautés. Cela m’a motivé à explorer d’autre domaines, ainsi j’envisage de comparer des pratiques religieuses des deux communautés avant l’arrivée du christianisme en Bretagne ou territoires celtes et aussi bien avant l’établissement de cette religion et de l’islam au Sénégal et plus particulièrement à Dakar.
Avez-vous contacté des instituts ou associations bretonnes et sénégalaises concernées pour exposer vos constats ?
Des contacts sont en cours. Aujourd’hui déjà dans ce cadre, je travaille avec l’association Damgan, Histoire et Patrimoine dont l’une des activités est la préservation et la diffusion du patrimoine historique de Damgan et alentours. Elle m’accompagne dans la mise en forme de mes résultats d’étude.
Des responsables bretons portent une attention particulière à mes recherches. Ils gèrent des instituts économiques bretons et parisiens soucieux de la promotion du tourisme de mémoire de notre région et de la consolidation de la diaspora bretonne du monde.
Je contacterai prochainement des églises du Finistère, car par le passés des missionnaires se sont penchés sur cette étude.
J’ai approché des instituts et association de Yoff et du reste de Dakar
Y avait-il des traces celtes et bretonnes au Sénégal ou inversement avant Jésus-Christ ?
Pas à ma connaissance, aucun livre ou document consulté n’atteste la présence celte ou bretonne dans les côtes sénégalo-gambienne avant l’arrivée des « navigateurs » portugais. Idem pour l’inverse.
Cependant, lors de la colonisation, les corses et les bretons constituèrent une forte communauté au Sénégal, contrairement à aujourd’hui. Les sièges de leurs associations se trouvent toujours l’un à côté de l’autre à Dakar. Ils s’activèrent dans la pêche, le commerce et la restauration.
Les deux communautés se sont-elles rencontrées ailleurs, hors de leurs lieux historiques ?
Je ne sais pas ! Toutefois dans mes travaux, j’ai noté qu’avant Jésus-Christ, le rapport des celtes et des lébous vis à vis du perse fut de manière respective, relativement pacifique (cf archive départemental du Morbihan) et constamment conflictuel (selon Oumar N’galla GUEYE, le sage historien yoffois de Dakar). Or les perses sont originaires essentiellement d’Iran, on peut supposer donc que les celtes et les lébous se sont rencontrés ou séjournés ensemble à une période dans la zone géographique qui recouvre l’Est de la méditerranée, l’Egypte, l’Ethiopie et le Moyen-Orient.
Quelle était la réaction des dakarois vis-à-vis de tes recherches ?
Des intellectuels et des sages de Dakar qui voyagent souvent en France ont aussi remarqué en Bretagne et en Vendée des mots similaires en wolof comme diwan et ker. Mais cela n’a pas suscité de questionnements ou de curiosité. Toutefois suite à la présentation de mes recherches dans une commission chargée de la réécriture de l’histoire du Sénégal, les membres yoffois et dakarois en général étaient surpris par le rapprochement culturelles des deux communautés. Ce cas sera étudié davantage lors de la révision de l’histoire de Dakar. Affaire à suivre !
Dans le cadre de la décentralisation, la commune de Yoff développe des partenariats économiques, sociaux et culturels avec l’Europe. Dans les manifestations culturelles en lien avec la mer, le festival de l’eau, cette commune a déjà invité des groupes culturels bretons et corses.
Quelle est l’état d’avancement de vos démarches et la suite de vos approches ?
L’état d’avancement porte sur la comparaison approfondie de la langue bretonne et wolof, bien que je ne sois pas linguiste de formation. J’essaye quand même !
L’association Damgan, Histoire et Patrimoine diffusera sur le net mes travaux provisoires.
Suite à mes contacts, j’attends la réponse des professeurs universitaires en histoire ou dialectes bretons, des responsables d’associations culturelles et d’église de la région.
Comme évoqué tout à l’heure, je souhaite me pencher davantage sur les pratiques religieuses anciennes des bretons avant Jésus-Christ et sur leur comparaison avec celles des lébous de Dakar.
Puis, si j’ai le temps et les moyens, je voudrais comparer les anciens dialectes bretons et lébous.
Enfin je désire contribuer à la diffusion de l’histoire et de la culture léboue et bretonne au niveau de nos pays (structures touristiques, culturelles, médiatiques…), à l’échelle internationale (Canada, USA, Europe, Afrique…) et auprès des diasporas respectives.
Quelles sont les perspectives et vos conclusions ?
Je souhaite que mes démarches soient une référence pour des étudiants et chercheurs qui mènent des études anthropologiques, linguistiques ou universitaires en général en lien avec le Sénégal et la Bretagne. Dans le cadre de la décentralisation et de transfert de compétences au niveau des collectivités territoriales en France et au Sénégal, Dakar et la Bretagne devraient à long-terme en toute autonomie renforcer leur coopération politique, économique, commerciale, sociale, et culturelle à travers leurs instituts publics et privés, leurs diasporas ou sociétés civiles en s’appuyant sur des études « non conventionnelles » comme la mienne.
A l’issue de mes travaux finaux, je crois fort que si on arrive à trouver les liens qui unissent les lébous (ou les sénégalais en général) et les bretons, alors on pourrait avoir plus d’éclaircissement sur nos origines respectives. Je rêve un jour que deux chanteurs sénégalais et breton, notamment Youssou NDOUR et Allan STIVELL, chantent ensemble avec des mots communs aux deux langues.
Cela ne relève plus du hasard !